Le cycle Bormelien - C'est l'automne

En fait, ce n'est pas le premier jour de l'automne... c'était mardi... ou lundi, tout le monde n'est pas d'accord sur la date, mais en tout cas aujourd'hui je suis sûre qu'on est en automne.

Le soleil rouge se lève maintenant sur le lac tous les matins, sortant de ses draps de brume, laissant traîner sur l'eau son long manteau orangé. L'eau est calme, à peine troublée par la vague d'étrave du bateau qui accoste dans le port au moment où j'arrive. Silence, calme, douceur où je me laisse bercer, encore un pied dans mes rêves, l'autre est presque déjà en cours. Le froid m'enserre, son baiser glacial me fait frissonner sous mon manteau de bébé nazgûl, je hâte le pas. Je flotte, virevolte au son d'une musique imaginaire, profite que le quai soit désert encore pour esquisser un pas de danse. Petit bonheur matinal, petit secret porté autour de mon coeur toute la journée, petit rayon de soleil enflammé du matin comme une caresse sur ma joue, comme un baiser si doux.

L'arche passée, je laisse le rêve derrière moi, pour le retrouver à la sortie, quelques heures plus tard. La couverture brumeuse magnifiant encore un peu le paysage pourtant déjà ensoleillé. Le lac se prend pour une mer sous mes yeux, ses vagues ronflent sur mon passage, comme de longs soupirs. Quelques écailles de sirènes brillent sous la surface des flots, joyeuse compagnie, comme celle de la lune, ce matin, qui me faisait un clin d'oeil. Le froid s'en est allé, compagnon fidèle du matin, il sait s'effacer quand il sent qu'il est temps, revient parfois dans la journée me rappeler qu'il existe. Entre-temps, la Ville d'Or s'est animée, les gens sont sortis, les longs manteaux envolés, les rues grouillent d'une vivacité intense et étourdissante. Le ronflement des moteurs a remplacé celui, plus doux, des vagues, les lycéens les moineaux dans la cour, le bruit du monde celui du Monde.